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"Justice sous tutelle", un constat accablant sur le système français

Rédaction
16 novembre 2009

"Justice sous tutelle" un documentaire coup de poing de Thierry de Lestrade et Brigitte Vital-Durand, co-produit par Canal+, décortique le système judiciaire français et ses rapports malsains avec le monde politique. Difficile d'organiser une plongée dans le monde de la justice, d'en expliquer les rouages de façon compréhensible et de recueillir des témoignages: c'est le pari réussi de ce film, diffusé le 16 novembre sur Canal + à 20H55, qui dresse un constat accablant de la machine judiciaire. "L'idée du film est née il y a 24 mois: faire un état des lieux de la justice, deux ans après le désastre d'Outreau. Il ne s'agissait pas d'avoir un regard extérieur accusateur, mais de suivre de l'intérieur le travail des magistrats", explique Thierry de Lestrade. Le documentaire défend un point de vue. "La tutelle est une notion vague et abstraite qu'il faut rendre compréhensible et vivante, avec des exemples concrets, des témoignages et des scènes pris sur le vif", poursuit le réalisateur. Trois ans après Outreau et les promesses de réformes qui ont suivi, aucun magistrat n'a démissionné. Cette inertie ne traduit-elle pas une volonté politique, une justice aux ordres, interrogent les auteurs. Depuis l'ENM, la prestigieuse Ecole nationale de la magistrature, où, contrairement à l'ENA, la notation reste la base du système, jusqu'à la Chancellerie et l'Elysée, le film dresse de l'intérieur un portrait sans concession. "Notre système est un système de soumission qui commence dès l'école", relève Eric de Montgolfier. Des juges comme Eva Joly ou Renaud Van Ruymbeke, des procureurs comme Dominique Barella (aujourd'hui rattaché à l'Inspection générales des affaires sociales), des avocats comme Eric Dupond-Moretti, des auditeurs de justice, tous s'expriment librement avec courage. En fil rouge, les propos particulièrement forts d'un ancien juge d'instruction Laurent Lèguevaque qui a quitté l'institution il y a 15 ans. "L'Etat attend de moi que je sois un bon fonctionnaire -pas de vagues- qui fasse des dossiers avec des pauvres gens, qui cerne les quartiers, pour que le politique puisse dire: on lutte contre la toxicomanie, on lutte contre le viol, on lutte contre tout", assène-t-il. La reprise en main du parquet, le projet de suppression du juge d'instruction, le manque de moyens (le budget de fonctionnement de la justice en France est de 6 milliards d'euros, contre 12 milliards en Grande Bretagne), la question de l'avancement et du plan de carrière des magistrats, tous les sujets sont abordés et l'éclairage apporté souvent consternant.

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