Rédaction
26 janvier 2003

Les professionnels de la télévision réunis au Festival international de programmes audiovisuels (FIPA) de Biarritz ne veulent pas d'images sous contrôle, qu'ils assimilent à une "violence faite aux auteurs". Après le rapport de Blandine Kriegel sur la violence à la télévision, les professionnels réunis par la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) pour discuter du sujet ont été unanimes. Estimant que leur liberté d'expression est menacée et qu'ils sont victimes d'un "processus généralisé de censure sur les contenus", ils ont dénoncé la transformation du processus de création de fiction en "oeuvre de commande". Pour le cinéaste Jean-Jacques Beineix, qui s'était opposé publiquement à Mme Kriegel, le rapport qu'il a qualifié de "tendancieux", "est un retour en arrière dans le pays de l'exception culturelle". "Il n'est pas du tout enterré. La mentalité et les idées sont là", a t-il dit, évoquant un retour "à l'ordre moral". Selon lui, "il n'est pas neutre de vouloir faire du cinéma le bouc émissaire d'un amalgame violence-pornographie, sachant que le cinéma pour l'instant échappe au formatage". Rappelant le dispositif de contrôle existant en France, la sociologue Monique Dagnaud (CNRS) a assuré que la violence est "très bien régulée sur les écrans français", conjointement par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), les pouvoirs publics et les diffuseurs. Elle a souligné qu'il n'y avait pas eu de procédure de sanction contre des diffuseurs depuis 1995, et, à ses yeux, "les montées d'adrénaline sont plutôt liées à une inquiétude de la société sur elle-même". Mais, a-t-elle relevé, pour 80% des gens, la violence sociale a à voir avec la violence à la télévision". Plusieurs intervenants, dont un membre de la commission de classification des films de cinéma, ont mis en garde contre la mise en place d'un système d'autocensure dans les chaînes, notamment au travers de comités de visionnage des programmes, puisque le CSA n'intervient qu'a posteriori. Certains se sont demandés si l'autocensure insidieuse pour parvenir à une "télévision du consensus" n'était finalement pas plus violente que le contrôle organisé. L'ancien directeur de la fiction de M6, Thomas Anargyros, devenu producteur, a pointé "la déresponsabilisation" sur les émissions de flux (reportages, magazines) alors qu'il y aurait une "surcensure" sur les auteurs de cinéma et de fiction à la télévision. Maurice Frydland, réalisateur membre de la commission Kriegel, s'est dit lui aussi "frappé par la violence des émissions de flux, de la TV poubelle, jeux et talk-shows à prétention sociologique sur des faits de société comme les viols ou la prostitution". "La violence et la pornographie peuvent être verbales à des heures de grande écoute" a-t-il souligné, citant des émissions de Thierry Ardisson (France 2) et Mireille Dumas (France 3). Quant au pédopsychiatre Stéphane Clerget (auteur de "Ils n'ont d'yeux que pour elle - les enfants et la télé", chez Fayard), il a jugé "dangereux de faire croire aux parents qu'on va expurger la télévision de toute violence". Selon lui, la vraie violence à la télévision est "directement liée au temps passé devant la télévision", et elle est moins présente dans la fiction que dans les reportages d'actualité, dans une société elle-même d'une grande violence.

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