Rédaction
5 avril 2003

La France, qui n'a guère convaincu la Commission européenne sur le dossier des secteurs interdits de publicité TV, est condamnée à revoir sa copie et à arracher des concessions aux secteurs concernés, notamment le cinéma et l'édition, opposés à tout assouplissement de la loi. Si les échanges, mercredi à Bruxelles, entre le ministre de la Culture et de la Communication Jean-Jacques Aillagon et le commissaire européen au marché intérieur Frits Bolkestein ont été "courtois et ouverts", selon le ministère, les propositions de la France sur les secteurs interdits (presse, distribution, édition, cinéma) n'en restent pas moins "insatisfaisantes" pour Bruxelles. M. Aillagon n'a fait de propositions que pour deux des quatre secteurs concernés: il a évoqué la levée de l'interdiction pour la presse et son ouverture progressive pour la distribution, mais a écarté tout assouplissement pour le cinéma et l'édition au nom de la défense de la "diversité culturelle". Pour les "pro-libéralisation", la France a tout fait pour s'attirer le refus, poli mais ferme, de Bruxelles. Les propositions de Paris étaient "en trompe-l'oeil", a ainsi estimé Jérôme Bédier, président de la Fédération des entreprises du Commerce et de la distribution (FCD), qui regroupe les grandes enseignes de distribution et qui aimerait avoir un large accès à la publicité télévisée. Pour l'Association des agences conseils en communication (AACC), la France a présenté mercredi à Bruxelles "une position intenable". "Il était évident qu'en présentant de telles propositions, l'échec était prévisible", a commenté Jacques Bille, délégué général de l'AACC. Pour les observateurs, la rencontre entre MM. Aillagon et Bolkestein a au moins permis d'éviter un "avis motivé" de la Commission, dernière étape avant le dépôt d'une plainte officielle auprès de la Cour européenne de justice de Luxembourg. M. Aillagon a prévu de revoir le commissaire Bolkestein avec de nouvelles propositions "avant l'été", a précisé mercredi son entourage. Mais il doit pour cela convaincre les secteurs concernés de faire des concessions. Le Syndicat de la presse quotidienne régionale (SPQR), qui a déjà fait des concessions sur l'ouverture de la pub TV à la distribution, a averti que "la marge de manoeuvre est très étroite" et renvoyé la balle au autres secteurs. "Le SPQR souhaite instamment que le gouvernement français intervienne auprès des secteurs du cinéma et de l'édition, de façon à ce que ces derniers participent à l'accord", a déclaré le président du SPQR Jean-Louis Prévost, demandant "à toutes les parties concernées" par le dossier des secteurs interdits de publicité télévisée de "faire un effort, au nom de la solidarité". C'est donc vers le cinéma et l'édition que les regards se tournent, même si ces deux symboles de la diversité culturelle française ne semblaient guère d'humeur, jeudi, à faire des concessions. La société civile des Auteurs, réalisateurs et producteurs (ARP) a ainsi réaffirmé son "opposition absolue" à l'ouverture de la pub TV pour le cinéma et appelé M. Aillagon à "rester ferme sur cette question". Quant au Syndicat national de l'édition (SNE), il a fait valoir que l'édition n'était "pas mûre" pour s'ouvrir à la pub TV. "Nous allons discuter avec les autorités", a assuré son président Serge Eyrolles, "mais ce n'est pas parce que le commissaire européen est pressé qu'il faut immédiatement trouver des solutions qui ne seront, de toutes façons, pas bonnes".

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