RFI
 

Rédaction
25 octobre 2003 à 02h00

Sophie Malibeaux, la correspondante de Radio France Internationale (RFI) expulsée par les autorités sénégalaises, a quitté Dakar dans la nuit de vendredi à samedi à destination de Paris. La journaliste française, à qui le régime du président Abdoulaye Wade reproche un traitement "tendancieux" de la rébellion indépendantiste en Casamance (sud), est montée vers 01H20 locales (même heure GMT) à bord d'un avion régulier d'Air Sénégal International, qui a décollé peu après, a-t-on précisé à l'aéroport. Une quinzaine de journalistes étaient venus l'accueillir à l'aéroport pour lui manifester leur sympathie et déplorer cette expulsion, qui constitue une première au Sénégal, pays jusqu'alors réputé "pour son attachement aux valeurs de démocratie et de liberté", ont rappelé des organisations de défense des journalistes. "J'avais espéré jusqu'au dernier moment que cette +première+ n'allait pas être exécutée, mais je dois me rendre à l'évidence", a déclaré sur place Alpha Sall, secrétaire général du Syndicat des professionnels de l'information et de la communication du Sénégal (SYNPICS) et de l'Union des journalistes d'Afrique de l'Ouest (UJAO), en disant sa "tristesse" face à un tel événement. Sophie Malibeaux a quant à elle exprimé "toute (sa) reconnaissance aux journalistes du Sénégal, sénégalais ou presse étrangère, qui (l'ont) beaucoup soutenue et ont démontré leur attachement à la liberté de la presse et leur volonté de faire avancer le pays". Evoquant son expulsion, elle a dit qu'elle n'avait "pas compris comment c'était arrivé". "Je n'ai pas d'explication", a-t-elle dit, ajoutant avoir "beaucoup apprécié d'avoir travaillé au Sénégal", du fait "des gens (qu'elle y) a rencontrés". "C'est extrêmement pénible", a-t-elle ajouté, les larmes aux yeux. Le gouvernement sénégalais a reproché à Sophie Malibeaux une couverture qu'il a jugée "tendancieuse" de la crise en Casamance, région en proie depuis plus de vingt ans à une rébellion indépendantiste. Le ministère de l'intérieur l'a aussi accusée d'"ingérence grave" et de tentative de "sabotage" du processus de paix en Casamance. Sophie Malibeaux, 37 ans, installée au Sénégal depuis un peu plus d'un an, avait été interpellée le 7 octobre en Casamance et ramenée sous escorte policière à Dakar, où lui avait été signifié un arrêté d'expulsion. Alors qu'elle s'apprêtait à partir pour Paris, l'ordre d'expulsion avait été suspendu, jusqu'à ce que des dirigeants de RFI viennent à Dakar pour tenter de résoudre le problème. Mais leurs entretiens avec les plus hautes autorités du pays n'ont pas permis de faire annuler la mesure, confirmée jeudi. "Nous nous étonnons de cette mesure prise par les autorités sénégalaises. Ce pays était depuis quelques années un exemple à suivre en terme de liberté de la presse. La situation commence à se dégrader d'une manière inquiétante", a estimé Reporters sans Frontières (RSF). Alpha Sall a précisé avoir été interviewé par Sophie Malibeaux alors qu'elle venait tout juste d'arriver au Sénégal. Le sujet du reportage, a-t-il dit, était "la liberté d'expression". L'expulsion de la journaliste intervient trois jours après la mort à Abidjan du correspondant de RFI en Côte d'Ivoire, Jean Hélène, tué par balle par un policier ivoirien. La direction de RFI a indiqué qu'elle allait mener une réflexion "approfondie" avant de décider d'envoyer ou non de nouveaux correspondants permanents dans ses bureaux d'Abidjan et de Dakar.

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