Microsoft
 

Rédaction
23 mars 2004

La Commission européenne s'est refusée à tout commentaire après une réunion des experts de la Concurrence des Quinze centrée sur le montant de l'amende à infliger au géant américain des logiciels Microsoft pour abus de position dominante. "Nous avons un devoir de confidentialité (...) Je ne donnerai pas d'information" sur le contenu de la réunion, a déclaré Amelia Torres, la porte-parole du commissaire européen chargé de la concurrence Mario Monti. Le montant de l'amende peut théoriquement atteindre 10% du chiffre d'affaires annuel du groupe sanctionné, soit près de 3 milliards de dollars dans le cas de Microsoft. En réalité, les amendes prononcées sont en général largement inférieures à ce plafond, et les pronostics évoquaient jusqu'à maintenant une amende proche de 200 millions d'euros dans l'affaire Microsoft. La Commission s'apprête à condamner mercredi le groupe américain pour abus de position dominante à une amende, ainsi qu'à l'application de "remèdes" pour mettre fin aux infractions constatées. Mario Monti entend créer un précédent en matière de lutte antitrust dans un secteur technologique aux enjeux majeurs. En annonçant jeudi l'échec de négociations de dernière minute avec Microsoft pour tenter de régler cette enquête à l'amiable, Mario Monti a lui-même affirmé sa volonté de "créer un précédent solide" établissant "des principes clairs pour le futur comportement d'une entreprise" avec une telle position dominante. Car une fois réglée l'enquête actuelle sur Microsoft, la Commission devra trancher sur d'autres plaintes déposées contre le géant américain du logiciel. La CCIA, association de concurrents de Microsoft, a en particulier demandé en février 2003 à Bruxelles de se pencher sur la dernière version de Windows XP et les risques d'extension de position dominante du groupe sur des marchés comme les logiciels de gestion de messageries texte ou image (photo, vidéo) pour téléphones portables ou ordinateurs de poche. Lors des négociations intervenues cette semaine entre Mario Monti et Steve Ballmer, le Pdg de Microsoft, les deux parties avaient réussi à rapprocher leurs vues, même sur le volet le plus sensible de l'enquête en cours: l'intégration dans Windows de Media Player, un logiciel de lecture de lecture de fichiers audio et video qui par sa présence dans Windows écrase la concurrence. Le groupe américain, qui refusait de dissocier Windows et Media Player, avait proposé une solution: permettre l'installation de logiciels concurrents, aux côtés du sien. L'offre était jugée alléchante par Bruxelles, mais M. Monti demandait encore un effort à Microsoft pour qu'il s'engage sur sa politique à venir d'intégration de nouveaux produits dans Windows. Mais le groupe américain n'a pas accepté cette demande, et c'est là que les positions des parties ont été irréconciliables. Mercredi, la Commission devrait donc imposer unilatéralement ses "remèdes" à Microsoft. Elle devrait le forcer à mettre à disposition de ses concurrents des "interfaces" permettant à leurs logiciels de dialoguer avec Windows. Elle devrait surtout lui demander de commercialiser une version de Windows sans Media Player. Une exigence de nature à satisfaire les adversaires du géant américain, restés sur leur faim quand les Etats-Unis ont réglé à l'amiable leur propre enquête antitrust contre Microsoft en 2001. La Commission va "plus loin que les Etats-Unis car les autorités américaines n'ont pas réglé la question des ventes liées" de nouveaux logiciels avec Windows, estime l'avocat de l'un des plaignants. La décision de l'exécutif européen sera "très importante car lier Windows" à des logiciels du type de Media Player "est au coeur" de la stratégie du groupe, ajoute-t-il. Microsoft n'entend d'ailleurs pas en rester là. Le groupe a déjà annoncé son intention de contester une éventuelle condamnation mercredi devant la justice européenne. Une longue bataille judiciaire se profile donc, à laquelle la Commission s'est évidemment préparée.

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