France 3
 

Rédaction
7 janvier 2007

Vingt ans après l'avoir incarné au théâtre dans une mise en scène de Roger Planchon, Michel Serrault reprend les hardes de "L'Avare" dans une subtile adaptation télévisée réalisée par Christian de Chalonge diffusée ce soir sur France 3 à 20H55. Les cheveux grisâtres et mal coupés, vêtu d'une redingote fatiguée, le visage hâve, Michel Serrault compose avec sobriété un Arpagon tragique, victime de sa passion pour l'argent et prêt à lui sacrifier le bonheur de ses enfants. Les teintes sourdes des costumes qui contrastent avec la pâleur des visages, les couleurs sombres des murs de la demeure éclairés épisodiquement par la flamme des bougies baignent le film d'un clair-obscur presque angoissant. La maison est un labyrinthe où tout le monde s'épie, le père humilie ses enfants et ses domestiques, les enfants mentent à leur géniteur: l'amour que porte Arpagon à l'argent salit et pourrit tout, et lui-même sombre dans la paranoïa. Mais "L'Avare" est aussi une pièce drôle et les scènes comiques, nombreuses et réussies car jouées sans outrance, servent de respiration dans cet univers confiné. Arpagon est "un pauvre malheureux, qui me fait pitié par moment. Mais il est aussi roublard et il s'amuse", déclarait Michel Serrault lors de la présentation du film à la presse. "Il souffre et il rit. J'ai essayé de ménager les deux, chose que je ne pouvais pas faire avec certain metteur en scène", ajoutait l'acteur, lançant une pique à Roger Planchon qui l'avait dirigé en 1986. "Ce que j'aime dans Molière, c'est la rigueur, la précision de la pensée et la vérité. Aux acteurs d'injecter de la compréhension et de l'intelligibilité" à la prose de l'auteur, estime-t-il. Pour cette adaptation, Christian de Chalonge, qui a tourné cinq films avec Michel Serrault, a restitué le texte dans sa totalité. Si le début semble un peu lent, le film trouve vite son rythme et le téléspectateur est happé par cette histoire de passion égoïste et d'amours contrariés. "L'Avare" est "l'une des oeuvres de Molière qui me tient le plus à coeur car je la trouve très mystérieuse", explique le réalisateur. "Les personnages deviennent de plus en plus prisonniers d'Arpagon et de son univers mental, mais la pièce garde une fantaisie propre à Molière". Bien que les costumes et la langue situent cet "Avare" au XVIIè siècle, la pièce trouve des échos très contemporains, selon Christian de Chalonge. Elle parle des conflits de générations, toujours vivaces même si les motifs des disputes ont changé, et elle parle aussi du pouvoir de l'argent, souligne-t-il.

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