Vivendi
 

Rédaction
11 juin 2002

Après ses déclarations fracassantes sur "la mort de l'exception culturelle" française et les craintes suscitées par l'éviction de Pierre Lescure du Groupe Canal+, Jean-Marie Messier, pdg de Vivendi Universal (VU), essaie de rectifier le tir en faisant les yeux doux au cinéma français. Nomination du président du Festival de Cannes au conseil de surveillance de Groupe Canal+, garanties sur les engagements de la chaîne envers le cinéma, abandon du projet de reprise des futures chaînes cinéma de AB Groupe... tout est bon pour regagner les faveurs des professionnels du septième art. Premier geste, M. Messier a finalement accepté, dans un courrier adressé vendredi au président du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) Dominique Baudis, d'annexer à la convention liant Canal+ et le CSA les accords conclus entre la chaîne cryptée et les organisations professionnelles du cinéma. Auparavant, le patron de VU proposait seulement de les joindre à la charte liant Groupe Canal+ à VU, quitte à annexer la charte à la convention du CSA. Seul bémol, selon le représentant d'une des organisations du septième art, "Messier refuse d'inscrire dans la convention la clause de non-discrimination promise en son temps par Pierre Lescure (ancien pdg de Groupe Canal+, ndlr), qui interdit au groupe de favoriser les films qu'il produit lui-même". "Il prétend que le code du commerce interdit déjà une telle discrimination. Mais si ça ne change rien, pourquoi refuser de l'inclure?", s'interroge-t-il. Deuxième geste, le frein mis au projet de reprise par CanalSatellite des futures chaînes cinéma de AB Groupe, rapporté par la presse en fin de semaine dernière. Dès vendredi, l'ensemble des organisations du cinéma se félicitaient "d'une décision qui contribuera à ramener leur sérénité aux relations traditionnelles et interactive entre leur profession et Groupe Canal+". Emises depuis le Luxembourg, les futures chaînes cinéma de AB Groupe risquaient, selon les professionnels du cinéma, de contourner la législation française en matière d'obligations de production. Ni confirmé ni infirmé depuis, l'abandon du projet "était dans l'air depuis plusieurs semaines", affirme un partenaire de Canal+. "Ils se sont rendu compte que ce serait une concurrence supplémentaire pour leurs chaînes". Dernier geste, la nomination samedi à la vice-présidence de Groupe Canal+ de Gilles Jacob, actuel président du Festival de Cannes. Une nomination qui suscite des réactions mitigées chez nombre de professionnels. "Je me réjouis que quelqu'un d'aussi sensible à la diversité culturelle que Gilles Jacob soit nommé à Canal+", a ainsi déclaré Pascal Rogard, délégué général de l'ARP. Mais pour souligner aussitôt "l'incompatibilité absolue entre la présidence du Festival de Cannes et une responsabilité au sein d'un groupe audiovisuel lui-même producteur de films, et filiale d'un groupe (VU) possédant un studio américain (Universal)". Une position partagée par d'autres organisations, sous couvert d'anonymat: "On ne veut pas s'attaquer à Gilles Jacob, mais c'est très étonnant qu'il ait accepté un tel poste", souligne l'une d'elles. "Il va devoir choisir entre Canal+ et le festival". Le ministre de la Culture et de la Communication Jean-Jacques Aillagon a assuré lundi qu'il avait "fait vérifier qu'il n'y a pas d'incompatibilité entre cette nomination et les statuts du Festival", et Gilles Jacob a rappelé qu'il est "au Conseil de Arte sans que (ses) choix et (son) indépendance soient contestés".

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