Jeux vidéo
 

Le jeu vidéo mérite une place de choix dans les médias

Frédéric SCHMITT
16 juillet 2025 à 19h37

Le jeu vidéo est depuis longtemps maintenant passé du simple divertissement de niche en un phénomène culturel mondial. Pourtant, lorsqu'on allume la radio ou la télévision, il reste souvent cantonné à la rubrique loisirs pour les personnes passionnées par l'informatique ou par les technologies. Un paradoxe quand on sait que des millions de spectateurs suivent les grandes compétitions d'e-sport aussi assidûment que les fans de football regardent les matchs de leur équipe favorite.

De nombreux passionnés scrutent chaque jour les sites spécialisés dans le domaine. Ils cherchent, par exemple, à découvrir quel est le casino le plus rentable dans lequel investir une mise symbolique afin de pimenter leur session de jeu en ligne. S'il est beaucoup plus présent sur le web, le gaming manque par contre cruellement de place ailleurs. Le jeu vidéo ne se limite pourtant plus à la manette, mais touche à des sphères comme l'économie ou encore la sociologie.

Un public déjà conquis

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. En France, plus de 70 % des 15-45 ans jouent régulièrement aux jeux vidéo, qu'il s'agisse de blockbusters sur console, de titres indépendants ou de parties occasionnelles sur mobile. Sur Twitch, la plateforme de streaming dédiée au gaming, les vues étaient plus de 140 millions chaque mois début 2025. C'est autant, voire plus, que certaines émissions de grande écoute à la télévision. Malgré cela, les débats sur l'éducation, la santé ou la culture laissent souvent de côté cette audience hyper-engagée, sous prétexte que le jeu serait trop technique ou pas un loisir assez sérieux.

Les professionnels du secteur, eux, ne s'y trompent pas : éditeurs, créateurs de contenu, équipes d'e-sport et marques investissent massivement pour toucher ces communautés. Or, lorsque ces mêmes acteurs cherchent à expliquer leur démarche ou à promouvoir leurs événements, ils se butent à un mur médiatique. Il s'agit d'un fait, le jeu vidéo peine à trouver sa place dans les journaux télévisés ou encore dans les matinales à la radio.

Les retombées économiques et sociales

Au-delà du simple divertissement, le jeu vidéo génère un impact économique considérable. Les studios français pèsent plusieurs centaines de millions d'euros par an en chiffre d'affaires, et de nombreux salons professionnels comme le Paris Games Week rassemblent plus de 300 000 visiteurs chaque année. En parallèle, les métiers du game design, du sound design, du marketing ou du community management offrent des débouchés variés, parfois même mieux rémunérés que dans d'autres secteurs créatifs.

Socialement, ce type de jeu favorise la création de communautés, l'apprentissage de compétences numériques et la collaboration internationale. Les tournois d'e-sport, diffusés en direct, créent un sentiment d'appartenance et de fierté, tout en valorisant l'excellence et le fair-play. Les cas de reconversion professionnelle d'anciens athlètes ou d'artistes devenus commentateurs de parties illustrent la diversité des parcours possibles.

Jeux vidéos et médias : vers une meilleure synergie

Pour que le jeu vidéo trouve véritablement sa place dans l'espace public, quelques pistes méritent d'être explorées :

  • Intégration dans les grilles des programmes
    Plutôt que de cantonner le jeu vidéo à quelques publicités, les chaînes devraient proposer des émissions d'analyse sur le modèle des talk-shows sportifs, avec des journalistes spécialisés et des experts pour décortiquer les sorties majeures, les tendances de streaming et les enjeux économiques ou sociaux.
  • Reportages immersifs
    Les documentaires sur la création d'un jeu, le fonctionnement d'une équipe d'e-sport ou les coulisses d'un studio indépendant pourraient remplacer certains sujets traditionnels sur la gastronomie ou sur la mode, pour capter le public en attente de cela.
  • Partenariats transversaux
    Des collaborations entre stations de radio et influenceurs, des tables rondes entre directive culturelle et représentants du secteur ou encore des rubriques dédiées aux créateurs francophones seraient intéressantes. Il s'agit de leviers pour enrichir le discours et renforcer la légitimité du jeu.

Éducation aux enjeux

La sensibilisation dès l'école aux enjeux du gaming aideraient les futurs citoyens à décrypter les messages et à mieux comprendre un univers qui pèse toujours plus dans notre quotidien. Ces programmes pourraient évoquer la mécanique de jeu, la narration, le graphisme, mais aussi les questions d'éthique, de modération et de dépendance.

Perspectives pour l'avenir

Le contexte actuel est plus que favorable à ce changement de paradigme. Effectivement, avec l'essor des plateformes de streaming, les médias publics ont tout à gagner à inviter les créateurs de jeux, les commentateurs d'e-sport et les spécialistes du secteur à leur table. En valorisant le partage de connaissances, l'innovation technologique et la dimension sociale du gaming, ils toucheront non seulement les passionnés, mais aussi les novices, les enseignants et les décideurs. Au-delà du simple divertissement, le jeu vidéo est aujourd'hui un vecteur de croissance, de lien social et de créativité. Le reconnaître officiellement et lui offrir un espace de parole digne de ses enjeux, c'est enrichir le débat public et surtout préparer l'audience d'aujourd'hui à comprendre les cultures numériques de demain.